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Aujourd'hui, rien n'est vraiment pareil. Neuf ans que maman est partie. Neuf ans, déjà...Non, pas déjà, seulement neuf ans, presque hier, suivant mon échelle du temps, raccourci, derrière et devant.
Même douleur, pesante, tenace, quotidienne, qui met tout à vif. Un deuil ne se "fait" pas. Il s'incruste, invisible, à jamais.
La voilà, maman, jeune ado, à l'âge de Marie, souriante près de sa (ma...) chère maison bretonne. Puis étudiante à Paris, durant la guerre. Le siècle d'avant, jeune et tragique. Et elle : des rêves, des angoisses, des frustrations, de la mélancolie, de la fantaisie. Du secret...
Tout est encore neuf, chez maman, pas encore mère. Plus tard, tu écriras :
" - Rêve de mai -
Matin de perle, au mois de mai
M'a réveillée.
Arbre des rêves,
Toute la nuit s'est effeuillée.
En frais jardin ruisselant d'eau
Me suis baignée
Et sous les roses en berceaux
Me suis coiffée.
Cueillant le vent
J'ai pris l'allée
De sable blanc
Toute semée
La claire allée et l'envolée
Des jours d'antan
Glissent les âmes bien-aimées
Au long du temps.
Ensemble prenons la journée
Se souvenant
Des longues heures qu'ont tressées
Vos doigts aimants.
Du frais jardin m'en suis allée
Très lentement
Sur le chemin des matinées
Tissées d'argent."
Et encore :
"(...) Nul n'a su me dire
Et je reste à chercher
Ce que cache un sourire
Que l'on n'a qu'ébauché
Où s'est perdu l'Amour
En haut de quelle tour ?
Où vit fleur, poésie
De l'éternelle vie ?"
Je crois que tu connaissais la réponse...
Mais belle question. Vaste !
L'amour n'est rien sans le souvenir, même si le souvenir d'un souvenir est un deuil incommunicable. Maman, rassure-toi, j'ai une mémoire incroyable, qui jamais ne sommeille.
Du passé, nulle table rase.